couverture
couverture
couverture
couverture
couverture
couverture
couverture
couverture
couverture
couverture

Ce numéro s’est construit à distance, au moment où une majorité de la population mondiale était assignée à résidence. Dans la continuité du dernier numéro consacré à l’oxymore, cette édition prolongeait à travers l'antithèse les réflexions sur les notions de contraire et de contradiction omniprésentes dans nos sociétés. Nous sommes partis à la rencontre de Forensic Architecture, groupe de recherche et d’investigations basé à l'Université de Londres, d’Architectes Sans Frontières, qui vise à réduire les risques liés aux conditions d’habitat des personnes vivant dans des squats et bidonvilles, de Theo Deutinger, pour qui la tyrannie humaine a inspiré un manuel édifiant ou de Marc Lescheller, dont les architectures-sculptures symbolisent la non-construction. Nous avons poursuivi nos enquêtes sur les frontières et les territoires en suspens, en passant par les refuges de Calais ou les marbres de l’Alentejo. Nous avons souhaité répondre à cet étrange dérèglement planétaire, incontrôlable mais pourtant bien là : oui, mais.

© photos
Chantal Casanova

fig. #6

titre antithèse

2021

190 x 255 mm

160 pages

ISSN
2493-3597

20 €

édito

Quelle étrange période que ces six derniers mois. Pour la première fois, une majorité de la population mondiale a été assignée à résidence afin d’éviter la propagation d’un virus dont personne ne peut ignorer le nom. Partout, tout le temps, on ne parle que de ça. Le coronavirus est un « blast » qui ne s’arrête plus. Cette surmédiatisation fait vibrer des ondes anxiogènes à l’intérieur de nos corps. Elle nous plonge dans un état de doutes et de bouleversements. État dont on ne sait combien de temps il va durer, ni comment il va nous transformer.

En France, la gestion de cette pandémie a généré non seulement un état politique d'exception mais aussi une régularisation hygiénique du corps social. On parle déjà du fait que le régime d'exception transitoire, qui a remplacé l'état d'urgence sanitaire le 11 juillet, sera très probablement prolongé au-delà du 30 octobre initialement annoncé. Il permet à l’exécutif de prendre des mesures strictes réglementant la circulation des personnes, l'accès aux transports ou l'ouverture d'établissements accueillant du public, et par prolongation toutes tentatives de luttes contre les différentes formes d’oppression.

Doit-on se taire derrière un masque ? Doit-on obéir et fermer les yeux sur le réchauffement climatique, la crise migratoire, la montée du fascisme ou sur la propagation d’un nouveau virus nommé 5G comme autres exemples d'une politique d'austérité ? La réponse nous semble claire. Nous devons poursuivre les actions subitement gelées le 17 mars dernier, lorsque la France n’a plus eu le droit de sortir dans la rue. À Françoise Vergés, politologue et militante féministe, de nous rappeler que « c’est précisément dans des moments comme ceux-ci qu’il faut activer la pensée utopique comme énergie et comme force de soulèvement, comme rêve émancipateur et comme geste de rupture ».

Quel rôle un média tel que fig. peut-il avoir dans l’activation de la pensée utopique ?

Dans la continuité du dernier numéro consacré à l’oxymore, fig. décide de prolonger, grâce à l’antithèse, les réflexions sur les notions de contraire et de contradiction dont notre époque déborde. Les récits se poursuivent en effet ici en substituant à l’opposition de deux mots celle de deux idées. La notion d’antithèse dépasse même la question de la figure de style puisqu’elle est majoritairement connue comme la seconde étape du célèbre plan dialectique thèse - antithèse - synthèse. L’efficacité du raisonnement repose sur le fait que l’antithèse ne contredise pas la thèse, mais la nuance.

Attendez-vous de l’architecture qu’elle vous abrite entre quatre murs recouverts d’un toit ? La dialectique manichéenne oppose brutalement deux réponses à cette idiote question : oui ou non.

À la place, il s’agit de tempérer la partie précédente, permettant ainsi de faire évoluer le schéma vers : oui, mais. D’une part, parce qu’il est essentiel de rappeler que oui, l’architecture a ce rôle majeur, simple et pourtant relayé en queue de peloton des objectifs de certains décideurs, aveuglés par d’autres idéaux et incapables de se mettre à la place de ceux pour qui, de loin, ils décident. Puis, parce que c’est de ce « mais » que naissent les grands renversements. Les luttes puisent leur racine dans la dénonciation des inégalités, pas dans leur négation. Ne laisser à l’oppresseur aucun choix sauf celui de se reconnaître en tant que tel : c’est ce « mais » qui veut dire « non » qui le permet en incarnant une réserve de puissance.

C’est donc à partir de ce « mais » que les contributeurs•trices de ce numéro ont été invité•e•s. Nous sommes partis à la rencontre de celles et ceux qui ont préféré l’antithèse à la collaboration, qui utilisent les outils de l’architecte à d’autres fins que celles de la construction, dans des livres, des photographies, des investigations, des expositions, des installations artistiques ou des projets solidaires.

Quelle étrange période que ces six derniers mois. La survivance du coronavirus, à l’image de celle des grands incendies forestiers, nous rappelle que notre monde s’affaiblit, qu’il brûle à son tour de nous répondre : oui, mais.

revue fig.

revue.figures@gmail.com
instagram
facebook

©fig. 2021
conditions générales de vente
mentions légales